2,3 millions de Vénézuéliens auraient fui leur pays durant ces trois dernières années d’après les chiffres des Nations Unies. Pour survivre, sans se retourner, les habitants quittent leur pays en laissant derrière eux leur logement vacant. Drôle d'ambiance dans la capitale, Caracas : des rues désertes, des immeubles vides... Un exode important qui inquiète les autorités internationales et des habitants en exil qui perdent beaucoup.
Un climat de crise qui pousse les Vénézuéliens à fuir leur pays
Les Vénézuéliens fuient la misère. Insécurité, pénuries de denrées alimentaires, de médicaments, hyperinflation (82700% en juillet comparativement à l’an passé), chômage pour un Vénézuélien sur trois, une situation quotidienne difficile contre laquelle les Vénézuéliens ne peuvent plus lutter. Un climat de crise politique, économique et sociale historique les pousse à prendre la décision de partir rapidement en abandonnant sur place : logement, voiture... pour trouver du travail ailleurs et vivre mieux dès qu'une occasion se présentera. Le phénomène inquiète et interroge notamment l'ONU qui dénombre 7,5 % de la population vivant hors du pays. Sur les 2,3 millions, plus d'un million de personnes seraient en Colombie, 550 000 en Équateur, 52 000 au Brésil et 280 000 au Pérou. Les pays voisins, voyant ce flux incessant de migrants, ferment leurs frontières et les ONG craignent une crise humanitaire. L'Europe va verser 35 millions d'aide humanitaire au Venezuela.
Le pétrole qui avait fait jusque-là du Venezuela un pays prospère est l'une des principales causes de la crise économique. Le cours s’est effondré et le Venezuela n'exporte plus suffisamment. L'économie non basée sur le pétrole est par ailleurs détruite. Devant la crise migratoire, le dirigeant Nicolas Maduro demande aux habitants de revenir dans leur pays. Malgré la dévaluation de la monnaie, le cours du bolivar continue de chuter. Pour les analystes, le Venezuela ne peut sortir seul de cette impasse. Le pays est ruiné et les réformes annoncées ne restaurent pas la crédibilité, la confiance qui pourrait faire revenir les migrants. « S’il n'y a pas d'apport extérieur, je vois mal comment le Venezuela pourrait repartir », estime sur France info le politologue Gaspard Estrada.
Des immeubles désertés, des rues vides et des logements vacants dévalués
Les Vénézuéliens fuient en ne prenant que quelques affaires et laissent ainsi leur logement vacant avec des signes de présence comme une bouteille qui traîne sur un bar, une lumière allumée, mais aussi des signes d’abandon comme une voiture couverte par une housse plastique sur le parking, une boîte aux lettres pleine de courriers.... Ce phénomène a pris tellement d'importance que des services sont proposés pour gérer les maisons fermées, payer les factures, surveiller les habitations. On s'en doute vols et vandalisme sont monnaie courante. Des personnes restées au pays vont vérifier de temps en temps si le logement n’est pas squatté. Et les copropriétés ne répondent à aucune question quant aux propriétaires de ces logements et à leur situation.
Pourquoi partir si précipitamment et pourquoi ne pas chercher à vendre le logement avant de quitter le pays ?
Un départ précipité est provoqué par une opportunité de travail même précaire pour laquelle les Vénézuéliens n’hésitent pas. Ils préfèrent garder leur logement inoccupé plutôt que de le vendre parce que le logement acquis par un dur labeur a perdu en cinq ans de 70 à 80 % de sa valeur.
Alors quand les propriétaires Vénézuéliens sont installés ailleurs, pourquoi vendre avec une telle perte ? Ils laissent leur logement fermé et attendent que la situation s'améliore pour revenir dans leur pays ou pour vendre leur logement. Les Vénézuéliens qui ont migré n'essaient pas de louer non plus car ils ne sont pas sûrs de pouvoir le récupérer en revenant. D’autant que le Venezuela ne facilite pas les expulsions et impose des durées de bail d’un an minimum et qui peuvent aller jusqu’à 3 ans.
Les Vénézuéliens choisiront-ils de revenir un jour dans leur pays ? Réintègreront-ils leur logement ? Tout dépendra de la façon dont le Venezuela sort de la crise et des conditions offertes aux habitants. Ce qui est sûr, c'est qu'ils n'ont pas choisi de bon cœur de partir, laissant leur pays, leur famille, leurs amis…