Les habitants manifestent contre Airbnb en Grèce
Depuis quelques temps, les manifestations ne sont pas rares dans les rues des grandes villes grecques. À Athènes, non loin du site archéologique, des habitants distribuent des tracts traduits en anglais : "Nos quartiers sont sous haute pression, non au développement incontrôlé des locations de courte durée du type Airbnb".
Si les Grecs se révoltent, c'est parce qu'Airbnb leur pose des problèmes bien éloignés des préoccupations touristiques : nombreux sont les propriétaires qui expulsent leurs locataires pour louer leur logement via Airbnb. Il faut dire que le gain est attrayant : une location bien située louée 400€ par mois sur le marché immobilier locatif classique rapporte facilement 900 à 1 000€ en prenant l'option Airbnb. Quand le salaire des fonctionnaires n'excède très souvent pas les 850€, il devient impossible de faire face à la situation.
Les prix de l'immobilier en Grèce explosent
Dans certaines villes prisées des touristes, les prix de l'immobilier en Grèce atteignent des sommets. À Exarchia par exemple, sur 12 mois, le montant des locations a subi une hausse de +34% selon les données de l'agence immobilière Remax. "Nous n’allons pas offrir Exarchia aux touristes", "Touristes, vous faites de la gentrification en enfer !" peut-on lire sur les murs de la ville.
Preuve du succès des locations de courte durée, le chiffre d'affaires généré a augmenté de +105% pour la seule année 2018.
Quel encadrement pour Airbnb en Grèce ?
Les villes du monde entier adoptent tour à tour des mesures pour encadrer les locations de courte durée, via Airbnb notamment. Mais la Grèce n'a pas encore posé de strictes limites. La seule obligation faite aux propriétaires qui louent un logement de courte durée est d'en déclarer les montants perçus, et ce depuis 2017.
La réglementation impose également la location de deux logements maximum sur Airbnb et 90 nuits maximum par année louées. "Dans les faits, ces réglementations ne sont pas respectées. L’Etat y voit son intérêt, car les taxes permettent d’engranger des revenus. Mais il devrait mettre en place plus de contrôle, cela ne fait pas partie des prérogatives de la mairie", explique Thomas Katsadouros, chargé du logement à la mairie d’Athènes.
Petits propriétaires VS professionnels de la location Airbnb
Mais Airbnb et autres plateformes de location de courte durée ne sont pas vus comme le mal absolu par tous les Grecs. Il est indéniable que ce type de marché locatif a des effets négatifs sur les habitants, mais il apporte également des fonds aux villes, rendant possibles certains projets laissés de côté : "À Athènes, de nombreux bâtiments étaient abandonnés, et sont désormais en train d’être retapés. Des quartiers entiers qui avaient été désertés pendant la crise revivent grâce au tourisme", affirme encore Thomas Katsadouros.
Airbnb a aussi l'avantage de permettre une bouffée d'oxygène à certains petits propriétaires. Alors que les fins de mois étaient difficiles, voire insurmontables, dans un pays où le salaire minimum atteint à peine les 650€, louer leur logement via Airbnb quelques jours par mois est une solution incontestable.
Il indispensable de différencier les "gros investisseurs", le plus souvent étrangers et les petits propriétaires qui ont eux-aussi du mal à terminer le mois. Ce sont principalement les premiers qui mettent à mal le fragile équilibre en achetant des immeubles entiers, expulsant les locataires de leur logement pour en faire un pied-à-terre touristique. "Depuis un an et demi, les acheteurs étrangers, surtout chinois, russes ou turcs, se ruent sur l’immobilier en Grèce pour obtenir des “golden visas”. En échange d’un investissement d’au moins 250 000 euros, ils obtiennent un visa d’une durée de cinq ans qui leur permet ensuite de se déplacer facilement dans l’Union européenne", met en avant Lefteris Potamianos, président de l’association des agences immobilière à Athènes.
Quelles seront les mesures prises par les autorités pour empêcher l'accentuation du phénomène ? Affaire à suivre…