Parmi les plus vastes chantiers immobiliers à Paris, la rénovation de la gare du Nord. Une rénovation qui fait débat, opposant la SNCF et la Ville de Paris qui sont définitivement en désaccord. Ce qui devait être une véritable aubaine pour la capitale en vue des Jeux olympiques de 2024 tourne au pugilat entre architectes mais pas seulement… Zoom sur ce projet hors normes et ses dérives.
La rénovation de la gare du Nord, un chantier immobilier à Paris colossal
Avec une enveloppe estimée à 600 millions d’euros, la rénovation de la gare du Nord était très bien partie. Il faut dire qu’elle est aujourd’hui en tête des gares d’Europe pour son nombre de voyageurs quotidiens et annuels mais aussi pour l’efficacité de sa plateforme de mobilités. Sa rénovation était donc une formidable occasion d’en faire une remarquable porte d’entrée de la ville sur fond de JO 2024. Alors que le projet initial faisait plusieurs gagnants : la SNCF, Ceetrus (filiale d’Auchan) et les usagers, le chantier se meut en confrontations politiques et en combat entre architectes. Entre la Ville de Paris et la SNCF, rien ne va plus.
Les enjeux de la nouvelle gare du Nord
Si cette rénovation est l’une des plus importantes dans le paysage immobilier à Paris, c’est parce qu’elle concentre un enjeu majeur : accueillir toujours plus de voyageurs. En 2001, un premier réaménagement a permis de porter cette capacité à 500 000 voyageurs par jour. En 2019, les usagers sont 700 000 à transiter chaque jour par la gare du Nord. A l’horizon 2030, les prévisions (source Le Monde) tablent sur 900 000 usagers quotidiens.
Un nouveau terminal de départs a ainsi été créé pour décongestionner encore la gare du Nord et anticiper l’augmentation du flux de voyageurs. Les espaces réservés à l’accueil et à la circulation ont également été doublés, passant de 30 000 à 60 000 m².
Les circulations depuis et vers les transports en commun (métro et RER) ont elles aussi été repensées par les architectes de Valode & Pistre.
Un projet immobilier à Paris qui fait débat
Mais pourquoi la ville de Paris et la SNCF se confrontent autour de ce projet de rénovation de la gare du Nord ? Alors que la SNCF est soutenue par l’Etat dans son chantier, la Ville dénonce un manque de cohérence dans certains flux de circulation mais également une absence de place pour les vélos et les bus, deux modes de circulation qui devraient être mis à l’honneur selon elle.
La multiplication des commerces de manière disparate fait également débat. Les architectes prévoient en effet de passer la surface commerciale de 5 000 à 19 000m². Le collectif d’architectes parisiens et la Ville de Paris fustigent un « centre commercial » qui n’a pas lieu d’être. Et les plans démontrent des commerces répartis sans réelle réflexion sur les différents niveaux. Face aux critiques, la SNCF affirme que les commerces ont été pensés pour répondre aux demandes des usagers.
Enfin, des boutiques détachées de la gare devraient prendre place sur 8 300m² pour « compléter l’offre du quartier » toujours selon le SNCF. Une donnée que la Ville de Paris voit d’un mauvais œil.
La densification est à l’ordre du jour dans ce projet de rénovation. La double halle édifiée en 2001 devrait laisser sa place à une construction de 300 mètres de longueur, 50 mètres de largeur et 5 étages de hauteur. De nouvelles places pour que commerces, restaurants, bureaux, parc urbain de 11 000m² sur les toits puissent s’implanter. Selon les Ville de Paris, il s’agit ni plus ni moins que d’un « bourrage de parcelle ».
Alors pourquoi une telle densification ? Pourquoi ne pas laisser davantage d’espace et de luminosité ? Parce que tous ces projets, de commerces et de bureaux notamment, offrent à la SNCF la garantie de rentabiliser le projet et de ne pas mettre la main au portemonnaie pour rénover la gare. Plus encore, pendant 46 ans, elle devrait toucher une redevance des locataires et des propriétaires de ces espaces supplémentaires. Entre rentabilité, bénéfices et prise en compte des besoins urbains et des usagers, le débat est loin d’être achevé. Cependant, le 10 octobre dernier, la Commission national d’aménagement commercial a donné son accord pour que soit mené le projet d’extension de la gare du Nord. La Ville de Paris a donc perdu cette première manche. Mais qu’en est-il du match ? Elle reste aujourd’hui fermement opposée au chantier. Affaire à suivre…